Au refuges des bons amis.

Voici l’article du journal l’Alsace sur l’ouverture des refuges le mercredi et jeudi , C’était le tour de notre refuge à la Waldmatt.

 » Aux refuges des bons amis

En hiver, la plupart des fermes-auberges sont fermées et pique-niquer dans la neige n’a rien de réconfortant… Alors, pour que les randonneurs puissent encore randonner les mercredis et jeudis d’hiver sur les plus hauts sommets des Vosges, Lucien Mentelé coordonne l’ouverture alternée de 20 refuges entre octobre et avril. Exemple au Rossberg.

Textes : Hervé de Chalendar Photos : Mathieu Lerch .

 

Le but de la randonnée matinale : le refuge du ski-club Rossberg de Thann, sur le pâturage de la Waldmatt. La soupe est en vue…Photo L’Alsace

Après environ trois quarts d’heure de montée, vers 10 h 45, le thermos à café et les paquets de madeleines sont posés sur la table de la « place des Nussbaum », à mi-chemin entre le col du Hundsruck et le sommet du Rossberg, sur les hauteurs de Bourbach-le-Haut. Cette « place », c’est une table et deux bancs de bois accrochés à un versant de forêt, à 926 mètres d’altitude.

80 litres de soupe

Huit copains sont ici réunis. Ils sont originaires de la vallée de Masevaux et de la région mulhousienne, sont tous plus près des 70 ans que des 60, et prennent tous un plaisir de gamins à randonner ensemble, chaque semaine, sur les sentiers du massif vosgien. Leur « chef » officieux, c’est Lucien Mentelé, de Kingersheim. Ce retraité de Gaz de France leur concocte un itinéraire pour chaque jeudi, quel que soit le temps, en leur envoyant par courriel l’itinéraire, le dénivelé et le lieu de la halte déjeuner. Ce jour-là est un mercredi, mais c’est parce que la presse s’est invitée à la balade. Lucien doit nous montrer une autre de ses activités informelles : l’animation d’un réseau de vingt refuges du massif ouverts en hiver aux randonneurs de semaine, à midi, les mercredis et jeudis.

Le but de l’expédition du jour, c’est le refuge du ski-club Rossberg de Thann, posé à 1 150 mètres au-dessus des vallées de Masevaux et de Saint-Amarin. Le café et les gâteaux avalés, on repart sur le coup de 11 h. La température est d’environ 5 degrés. La dernière neige a fondu rapidement, mais un serpent de glace s’incruste sur le sentier, là où elle a été tassée par les promeneurs. En bon papa poule, Lucien sort des « bottes secrètes » de son sac : des crampons à accrocher sous les semelles. Le résultat est immédiat : ça grimpe facile et c’est comme si l’on sentait déjà la bonne odeur de soupe…

Vers 11 h 30, le sentier balisé d’un rectangle rouge sort de la forêt. Il dépose le groupe de randonneurs sur une chaume magnifiquement bombée, marbrée de plaques blanches. C’est le moment que le soleil choisit pour tenter une percée. Le refuge est un chalet planté au beau milieu du paysage. Un drapeau tricolore flotte à son côté, comme pour annoncer qu’il y a de la chaleur à l’intérieur.

On décramponne et, quelques minutes plus tard, on se retrouve près d’un Kachelofe , autour de longues tables, à sourire béatement à la perspective d’un apéro et d’un repas chaud. Un autre groupe de randonneurs d’une dizaine de personnes vient d’envahir la salle. La moyenne d’âge n’a pas franchement baissé… S’ajoute encore la table du ski-club. « On est sept membres du club aujourd’hui , précise son vice-président Jean-Luc Barret. On n’aurait pas besoin d’être autant, mais puisque les gens avaient envie de venir… » La veille, ils se sont retrouvés dès 9 h chez l’un d’eux, dans la vallée, pour éplucher les légumes. 80 litres de soupe ont été préparés pour deux jours. À 2 € par personne, à volonté, avec de la saucisse et des croûtons, c’est une excellente affaire !

Ainsi, chaque mercredi et jeudi, entre le début du mois d’octobre et la fin du mois d’avril, deux ou trois refuges des sommets vosgiens proposent, pour déjeuner, de la soupe, des boissons et du café aux randonneurs qui n’ont pas peur du froid, mais ont envie d’un moment au chaud. « En été, les randonneurs peuvent aller dans une ferme-auberge ou tirer le repas du sac et manger dehors, mais en hiver, pique-niquer, c’est pas marrant… » , explique Lucien. C’est ainsi qu’est venue l’idée d’ouvrir en semaine, à tour de rôle, ces refuges qui appartiennent à des associations comme les Amis de la Nature, le Club Vosgien ou des ski-clubs.

Dès sa retraite, en 2002, Lucien a adhéré aux Amis de la Nature de Guebwiller (refuge du Rothenbrunnen, au Petit Ballon). Ces Amis et ceux d’Uffholtz (refuge du Molkenrain) ont été les premiers à initier le mouvement. Lucien a commencé à coordonner les bonnes volontés. Des refuges ont été sollicités, d’autres se sont proposés et « ça a fait boule de neige… Depuis six ou sept ans, le nombre des refuges s’est stabilisé à vingt. »

Chacun de ces refuges ouvre ainsi, en moyenne, trois mercredis-jeudis dans l’année. Lucien organise une réunion en juin, prend note des préférences des uns et des autres et divulgue son planning d’hiver à la mi-juillet. Créer une association ? « Pas besoin ! , rétorque le coordinateur. Chaque refuge a déjà la sienne… » « C’est rien d’officiel, ça se fait comme ça… et c’est très bien comme ça ! » , approuve Jean-Luc. Ce bon plan étant de moins en moins confidentiel, il est recommandé de réserver. « Le 5 janvier, au Petit Ballon, on était 90 et j’ai dû refuser 50 personnes ! , précise Lucien. Mais si des gens arrivent sans s’être annoncés, on essaye toujours de ne pas les laisser dehors… »

« Ça se fait comme ça… »

Ce système fait du bien aux finances des associations, mais « le but n’est pas lucratif , assure Lucien, c’est juste de faire quelque chose de convivial… » On confirme que ça l’est. Après la soupe arrivent les cafés et parfois le schnaps… Qu’importent les excès si on les élimine dans la foulée ? Pierrot Luttenauer sort l’album montrant les photos de la construction du chalet par ses membres, en 1952. Le gamin souriant, là, devant le chantier, c’est lui à 11 ans…

À 14 h, il faut sortir. Le ciel est carrément devenu bleu. Pour le plaisir, avant de retrouver les voitures au col du Hundsruck et la crasse de la plaine, on s’offre un détour par le Thannerhubel et le Baeselbach. Les au revoir sont brefs, vers 16 h, sur le parking : les copains remettront ça demain. Et les semaines suivantes… Les plaisirs des Vosges n’ont ni saison, ni fin. »

Ce contenu a été publié dans Presse. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *